Voyage en Navarre du 11 au 18 juin 2024

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 En ce 11 juin ensoleillé, nous voilà partis, encore une fois, pour l’Espagne, mais ce coup-ci, vers la côte atlantique en passant par Saint-Jacques de Compostelle.

Après quelques kilomètres d’autoroute, nous arrivons à Pampelune. C’est sur le site d’un village vascon, Iruna (= la ville), que le général romain Pompée fonda, en 700 av. JC, la cité de Pompaleao.

Au 10ème siècle, Pampelune devient la capitale de la Navarre, gouvernée par ses évêques. Dans les vieux quartiers, il y a les faubourgs de San Cernin, peuplés par des émigrants de la région de Toulouse. Voilà pourquoi nous retrouvons ici Saint Sernin ! Après des siècles de luttes intestines, Pampelune obtient, en 1979, un statut d’autonomie. Elle conserve une administration issue directement des privilèges médiévaux et peut ainsi se prévaloir d’une identité bien marquée.

Nous nous arrêtons d’abord sur la Plaza del Castillo, autrefois place d’armes du vieux château. C’est sur cette place bordée d’immeubles à arcades du 18ème que nous allons déjeuner à l’«Iruna », légendaire café Belle Epoque, l’un des plus anciens d’Europe. Ce restaurant a été rendu célèbre par Hemingway qui y écrivit certains de ses romans dont « Le soleil se lève aussi ».

L’après-midi, nous nous dirigeons vers la Plaza de Toros en suivant le chemin emprunté par les taureaux lors des fêtes de Saint Fermin, le patron de la Navarre. Lors de ces fêtes a lieu l’Enciero qui se déroule ainsi : le matin à 8 heures, on tire un pétard du clocher de San Cernin. Six taureaux, entourés de six bœufs, quittent leur enclos et se dirigent vers les arènes par la Cuesta de Santo Domingo et la calle Estafeta : 825 mètres courus en 3 minutes ! Les « mozos », garçons vêtus de blanc avec béret, foulard et ceinture rouges courent devant (à leurs risques et périls !). Puis, les six taureaux arrivent enfin aux arènes où ils attendent jusqu’à 17 heures, heure de la corrida où officieront trois toreros.

Nous avons, bien entendu, visité cette arène, la troisième plus grande du monde après celles de Mexico et de Madrid. Là, notre guide a déposé une cape, une muleta et une épée (en plastique) et je me suis dévouée pour faire le clown, ou plutôt le toréador !12 juin : en route pour Burgos, en passant par Olite et Logrono. Nous nous arrêtons d’abord à Olite. Et c’est drôle de se dire que nous commençons notre périple là où s’était achevé celui de l’année dernière.

Olite, la « ville gothique », vit dans l’ombre d’un château si démesuré qu’il a l’allure et les dimensions d’une cité médiévale. Elle fut la résidence de prédilection des rois de Navarre au 15ème siècle.

Nous visitons le Palacio Real. Le château se compose de deux éléments : le vieux palais, transformé en hôtel, et le nouveau palais construit à partir de 1399 par Charles III le Noble. Derrière la quinzaine de tours qui renforcent l’enceinte, s’étendent des jardins suspendus, lieux magiques d’où on voit au loin le paysage de champs. Les salles sont illuminées par un décor d’azulejos, de stucs peints et de plafonds à marqueterie polychrome.

L’église Saint-Pierre est la plus ancienne de la ville, du 12ème siècle. Le linteau du portail est orné de scènes de la vie de Saint-Pierre, et nous pouvons encore y voir des restes de polychromie.

Puis nous allons déjeuner à Logroño, capitale de la Rioja. La Rioja est une riche région viticole qui produit des vins renommés. Je les connais bien, non parce que j’y ai goûté, mais parce que je les rencontre souvent dans les mots croisés !

Nous passons devant l’église Santiago el Real avec son portail en forme d’arc de triomphe datant du 17ème siècle. La façade en est couronnée par une sculpture représentant Santiago « matamoro » : Saint-Jacques tuant les Mores en 1663.

Devant la co-cathédrale Santa Maria la Redonda, dont la construction date de 1435, nous sommes frappés par la puissance de ses deux tours jumelles baroques. La porte principale est bâtie sous la forme d’un grand retable du 18ème à l’imagerie d’albâtre.

En nous dirigeant vers le musée de la Rioja, nous nous arrêtons devant l’église de San Bartolomé avec sa grande porte à archivoltes pointues. Cette œuvre gothique des 13ème et 14ème siècles nous rappelle la vie de San Bartolomé. Là je me souviens de la statue dans la cathédrale de Milan, où on voit le saint portant comme un manteau sa peau que l’on vient de lui prélever…

Le musée de la Rioja nous permet d’admirer des sculptures romanes, des retables gothiques et des peintures allant de Dürer à Picasso.

En repartant vers le car, nous passons par des rues aux maisons à façades aristocratiques sans oublier la calle Laurel, célèbre pour ses bars à tapas et à vin.

13 juin : troisième étape de Burgos à León.

Nous entrons dans Burgos par la porte Santa Maria. Cette porte crénelée du 14ème a été modifiée au 16ème. Elle montre en façade les grands personnages de Burgos : en bas Diego Porcelos Rodriguez et en haut Fervian Gonzales et le Cid tiennent compagnie à Charles Quint.

Parlons un peu du Cid. Qui ne se souvient pas de la pièce de Corneille apprise au collège ou de Gérard Philippe jouant à Avignon ? Le Cid (1043-1095) a donc vraiment existé ! Voici son histoire (en partie…) : après avoir servi les rois de Castille Sancho II et Alphonse VI, il entre au service du souverain maure de Saragosse. Puis il se réconcilie avec son ancien suzerain et combat pour lui. Riche et craint par ses ennemis, il meurt en 1099. Son épouse Chimène résiste encore trois ans dans Valence assiégée par les Maures, mais s’enfuit en Castille après l’incendie de la ville. En 1921, les cendres des deux époux sont transportées dans la cathédrale de Burgos. La légende n’a pas retenu le caractère obscur du condottiere et de l’opportuniste. Au contraire, l’épopée a exalté la bravoure du héros, son rôle de « champion » (campeador) de l’hégémonie castillane.

La cathédrale a su adapter le style flamboyant venu de France et d’Allemagne à l’exubérance du style décoratif espagnol. Elle est ainsi devenue un musée de la sculpture gothique européenne. Sa construction se fit en deux étapes correspondant à deux styles gothiques : au 13ème siècle, nefs et portails sous l’influence du gothique français et au 15ème, flèches de la façade, chapelle du Connétable avec le renouveau du gothique flamboyant dans l’art local imprégné d’arabesques mudéjares. On entre par le portail du Sarmental : ses voussures illustrent la cour céleste, on y voit les quatre évangélistes écrivant sur des tréteaux. La construction du cloître a lieu entre-temps, au 14ème siècle. Ses galeries gothiques montrent des chapiteaux ornés d’un magnifique bestiaire médiéval. Dans l’ancienne chapelle de Santiago, le musée offre un vaste panorama de peintures et orfèvreries des 15ème et 16ème siècles.

 Nous avons eu droit à un excellent déjeuner au monastère San Zoilo, monastère qui fut reconstruit à la Renaissance.

Nous partons vers León en longeant le chemin de Saint-Jacques et nous apercevons de nombreux champs de coquelicots. A mon avis, on cultive le coquelicot en raison de ses vertus lénitives. N’oublions pas que c’est une sorte de pavot et que sa tisane est relaxante (je le sais, car je l’ai testée !).

Entrons maintenant dans la cathédrale de Leon. Erigée au milieu du 13ème jusqu’à la fin du 14ème, elle est la seule d’Espagne à avoir adopté le style gothique français aussi bien dans son plan (proche de celui de Reims), son élévation (équivalente à Chartres et à Amiens) que dans la conception de ses vitraux. Sur une surface de 1700 mètres carrés en 125 panneaux et 57 médaillons, ils illustrent trois grands thèmes : en bas, le règne végétal et minéral, derrière le triforium des personnages civils et des blasons et sur les fenêtres hautes, la théorie des bienheureux.

Plus loin, la façade du monastère de San  Marco se déploie sur une centaine de mètres. Les médaillons en haut-relief reproduisent les traits de quelques grands personnages de la Bible, de Rome ou d’Espagne : Lucrèce et Judith entourent Isabelle la Catholique. Au-dessus du portail central, Saint-Jacques terrasse le Maure.

Et nous finissons notre visite devant la Casa Botines, bâtiment aux allures de château de la Belle au Bois Dormant dû à Gaudi et construit en 1892 en seulement dix mois !

14 juin : direction Santiago en passant par Astorga et O’Cebreiro.

A Astorga, sur la cathédrale de style gothique flamboyant, les bas-reliefs illustrent certains épisodes marquants de la vie du Christ. A côté, bâti à l’aide de matériaux régionaux se dresse une version moderniste du palais médiéval née en 1899 de l’imagination de Gaudi.

Nous grimpons alors vers le col de Piedrafita. Ce sera la seule fois du voyage où nous aurons de la pluie et où il fera quelque peu frisquet. Le long de la route, nous pouvons apercevoir des « borreos », sortes de cabanes silos sur pilotis.

Et nous sommes à O’Cebreiro à 1300 m d’altitude. Ses « pallozas », curieuses maisons ovoïdales en pierre sèche au toit recouvert de chaume, rappellent les huttes celtiques. Elles constituent aujourd’hui un musée ethnographique et nous y avons dégusté une excellente cuisine roborative…

La petite église préromane du 9ème siècle nous raconte une histoire. Au 14ème, un habitant d’un village de la vallée vint assister à la messe d’O’Cebreiro en dépit du mauvais temps. En le voyant, le prêtre pensa : « Quelle folie que de risquer sa vie pour venir voir un peu de pain et de vin ! ». Mais alors qu’il donnait la communion, le pain se changea en chair et le vin en sang. Les reliques sont conservées dans des ampoules d’argent offertes par Isabelle la Catholique, et exposées avec le calice et la patène du miracle.

15 juin : halte à Saint-Jacques de Compostelle. Avec ses 96 000 habitants, Santiago est la troisième plus grande ville de pèlerinage chrétien après Jérusalem et Rome. La cité est animée par les étudiants, les touristes et les pèlerins. C’est une ville Renaissance, baroque et néoclassique avec ses rues pavées bordées d’arcades des quartiers anciens, mais c’est aussi une ville moderne aux nombreuses créations architecturales contemporaines en périphérie du cœur historique.

Et puisque j’ai déjà raconté une ou deux histoires, en voici une autre : la légende de Saint Jacques. Ami et disciple de Jésus, Saint Jacques vient prêcher l’évangile dans la lointaine province romaine d’Hispania. A son retour en Palestine, il est décapité par Hérode. Ses disciples déposent sa dépouille dans une barque qui échoue à l’embouchure de l’Ulla à 30 km au sud de Santiago. En 813, cette arche est découverte par un ermite sur le « campus stellae » (le champ de l’étoile) éclairé d’une lumière divine. Le roi Alphonse III fait alors construire une basilique et proclame Santiago patron du royaume. Avec l’emblème de la coquille, le monde médiéval en crise retrouve la foi. Et dès lors, des milliers de pèlerins affluent de partout en Europe, donnant naissance à divers chemins de Saint-Jacques.

Voilà pour la légende. Par des ruelles pavées, nous arrivons à la Praza do Obradoiro. Cette place doit son nom à la façade de la cathédrale que l’on appelait « l’œuvre d’or ». Nous ne verrons pas cette façade cachée par une grille. De plus, il faut payer (cher !!) pour y accéder. Au centre de la place, une plaque indique le kilomètre 0 du chemin de Saint Jacques. L’ensemble de la place est harmonieux malgré les styles différents des bâtiments qui l’entourent. L’usage du granit, commun à tous ces édifices, redonne donc à la place son unité harmonieuse.

Nous entrons ensuite dans le musée de la cathédrale qui offre un vaste panorama de l’art sacré du 13ème au 18ème siècles avec statues en bois ou en granit, peintures, objets sacrés.
Puis nous pénétrons dans la nef de la cathédrale à 11 heures, moment du service religieux auquel nous assistons et pendant lequel nous voyons en action le « botafumeiro » qui date de 1851 : grâce à un système de poulies placé sous la voûte à la croisée du transept, cet encensoir géant (1,50 de haut et 53 kilos) est balancé dans les airs par huit « tiraboleiros » (les hommes qui tirent les cordes).

L’après-midi, nous avons temps libre. Je prends le petit train qui nous promène dans les quartiers nouveaux hors la vieille ville. Nous voyons des bâtiments contemporains comme ceux de l’université. Et revenus en ville, nous retournons à la cathédrale. Cette immense cathédrale romane présente toutes les caractéristiques des églises de pèlerinage : plan en croix latine, vastes proportions, déambulatoire et triforium. Le maître autel est surmonté par une statue de Saint Jacques du 13ème et dominé par un énorme dais sculpté recouvert d’or.

Le soir, nous dégustons des tapas en buvant un excellent vin blanc !

16 juin : les Asturies et la côte atlantique.

Nous nous arrêtons d’abord au belvédère de Ribadeo d’où nous découvrons la « praia das cathedras », la plage des cathédrales. A marée basse, on peut se promener au milieu des falaises qui dévoilent des arcs de plus de 30 m de haut et des grottes naturelles en forme de coupoles. Le climat océanique favorise une nature exubérante : des hortensias magnifiques nous rappellent la Bretagne. Nous déjeunons d’une « fabada », une potée asturienne à base de gros haricots blancs.

Nous visitons ensuite Oviedo avec ses ronds-points fleuris. Il y a aussi des jacarandas en fleurs (depuis notre voyage en Andalousie, je guette ces arbres aux fleurs mauves que je trouve merveilleux).

La première cour asturienne s’installe à Oviedo à la fin du 8ème siècle. C’est le berceau de l’architecture préromane. La résistance victorieuse contre l’occupant musulman, point de départ de la Reconquête, valut à Oviedo le statut de principauté et l’héritier de la couronne d’Espagne porte toujours le titre de prince des Asturies.
Le centre monumental est parfaitement conservé autour de la cathédrale avec ses maisons aux façades multicolores. Woody Allen a dit que la cité ressemble à un décor de conte de fées. De jolies placettes animées et des rues piétonnes colorées sont décorées de nombreuses sculptures comme « La Laitière » ou « Les Vendeuses du Fontan » ».

Nous passons la nuit dans un hôtel à Narena. Cet hôtel est aussi une cidrerie où nous dégustons donc du cidre local, qui n’a rien à voir avec le cidre que nous connaissons. Personnellement, j’en ai bien aimé le goût.

17 juin : Bilbao.

Après une matinée de voyage en bus, nous sommes arrivés à Bilbao. Déambulation dans les vieux quartiers pour nous dégourdir les jambes, puis nous déjeunons de « pinchos » (tapas en basque) variés et en grand nombre.

Le but de la visite est, bien sûr, le musée Guggenheim. En 1977, Franck Gehry entreprend la construction de cette structure de titane, calcaire jaune et verre. C’est un enchevêtrement de courbes et d’écailles de titane. Dans ses 20 galeries distribuées sur trois niveaux, nous pouvons aller du labyrinthe en acier Corten de Richard Serra jusqu’au bouquet de Koons au dernier étage en passant devant des œuvres de Louise Bourgeois, Charles Oldenburg, Andy Warhol ou Roy Lichtenstein. A l’entrée du musée se dresse Puppy, un chien créé par Koons : sur une structure en acier, des plantes fleuries sont changées deux fois par an.

Du haut d’une colline, nous voyons mieux la structure du musée et nous pouvons constater que, à la suite de Gehry, des architectes du monde entier sont venus travailler à Bilbao : l’Anglais Sir Norman Foster avec le métro, l’Espagnol Santiago Calatrava avec la passerelle sur la rivière Nervion ou encore le Français Philippe Stark avec un entrepôt devenu centre de loisirs.

18 juin : Départ vers San Sébastian en matinée pour un tour de ville en car – faute de ne pouvoir trouver de place pour stationner.


Déjeuner dans un restaurant-cidraie où nous pouvons tirer directement le « breuvage » du fût. Chacun s’y essaie avec plus ou moins d’adresse pour dompter le jet depuis le tonneau jusqu’à son broc !

Nous quittons ensuite l’Espagne pour rentrer à Albi.