Voyage en Aragon du 23 au 28 septembre 2023

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23 septembre

Tôt le matin, nous embarquons pour l’Aragon. Nous passons la frontière par le tunnel de Bielsa où nous sommes accueillis par des marmottes se dorant au soleil.

Nous arrivons à Ainsa, capitale du Sobrarbe, considéré comme le berceau de l’Aragon au début du 11e siècle. La ville haute est un joyau de l’architecture aragonaise. Le donjon du château date donc du 11e siècle, Sancho III le Grand souhaitant une forteresse face aux éventuelles attaques des musulmans. La Plaza Mayor est ouverte côté château. Ses arcades sont toutes différentes et elle est pavée de calades posées de champ pour nettoyer les sabots des chevaux. L’église romane, d’une simplicité extrême, conserve une belle crypte ainsi qu’un minuscule cloître de plan irrégulier des 13e et 14e siècle.

Après le déjeuner, nous partons pour le sanctuaire de Torreciudad. En 1975 fut inauguré le sanctuaire actuel, construit par le cardinal Balaguer, fondateur de l’Opus Dei. Les bâtiments (assez pompeux, à mon avis !) sont précédés d’une immense esplanade d’où nous pouvons apercevoir les Pyrénées jusqu’au col de Roncevaux. Puis, nous partons pour Huesca, où nous nous installons à l’hôtel.

 24 septembre

Aujourd’hui, nous devons visiter Jaca, le monastère San Juan de la Pena et le château de Loarre.

Par sa position stratégique au pied des Pyrénées, Jaca devint, avec Sancho Ramirez I, la capitale de l’Aragon au 11e siècle. La ville est établie sur une terrasse de la large vallée du fleuve Arago. Le centre ancien est aménagé autour de deux places contiguës, bordées de belles maisons de style art déco.
La cathédrale est la première cathédrale romane d’Espagne. A droite du portail Sud, on peut voir une série de mesures ; elles sont gravées à la porte de l’église, mais aussi devant le marché aux tissus et elles servaient à authentifier les mesures des métrages vendus pour éviter les arnaques !

Nous nous promenons jusqu’à la citadelle qui faisait partie d’un système défensif pour protéger la frontière avec la France. Elle était entourée d’un fossé sans eau qui sert aujourd’hui de réserve naturelle pour des cerfs. Il y avait là Bambi qui gambadait avec sa maman sous la surveillance de son papa… Nous nous dirigeons ensuite vers le monastère semi-troglodytique de San Juan de la Pena.

Le monastère apparaît sous le surplomb d’un rocher. Le site fut choisi par un groupe d’ermites qui, au milieu du 9e siècle, adoptèrent la règle de St Benoît. Au 11e siècle, le couvent adhéra à la réforme clunisienne.
Nous visitons d’abord le nouveau Monastère, édifié de 1695 à 1705. Une exposition étonnante restitue la vie quotidienne des moines, entre prières et travail manuel. On découvre cette reconstitution à travers un plancher de verre et, en marchant au-dessus, on comprend mieux leur organisation.
Puis, nous allons vers le Monastère Vieux. L’église basse est l’une des rares constructions mozarabes du 8e siècle subsistant dans la région. Dans la partie supérieure, le panthéon des nobles aragonais abrite des niches funéraires des 11e et 14e. Pendant cinq siècles, les souverains d’Aragon et de Navarre ont été inhumés dans le panthéon royal.
Coincé entre le précipice et la falaise qui lui fait une toiture insolite, le cloître n’a plus que deux galeries aux chapiteaux historiés qui racontent l’Ancien Testament de la création de l’homme aux évangélistes. En redescendant, nous nous arrêtons à Santa Cruz de la Seros. L’église est le seul vestige d’un célèbre couvent de religieuses. Le village, niché au pied de la montagne, est constitué de belles maisons de pierre aux toits d’ardoise surmontés d’étranges cheminées. Ces cheminées coniques sont ornées de figures et coiffées d’une espèce de petit chapeau sensé empêcher les sorcières de plonger dans la maison.

Après le déjeuner, nous partons pour le château de Loarre, la forteresse militaire la plus importante d’Espagne.


Au 11e siècle, Sancho Ramirez, roi d’Aragon et de Navarre, fit agrandir ce nid d’aigle à 1100 mètres d’altitude pour en faire une forteresse inexpugnable. De loin, quand on approche, je pense à Peyrepertuse et à Quéribus. À l’intérieur, le château abrite une église du 12e siècle. La nef, la coupole et surtout l’abside, rythmées d’arcatures, sont d’un roman extrêmement pur.
Du haut des remparts, on n’aperçoit que la plaine qui poudroie et le ciel qui blanchoie… Et là, en regardant au loin, je pense au « Désert des Tartares » de Dino Buzzatti et je me fredonne la chanson de Brel « Regarde bien petit », tout en me prenant pour « Anna, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? » Dans le petit café, j’ai découvert une boisson fort rafraîchissante : la cerveza con lemon. En rentrant à Huesca, nous avons longé los Mallos de Riglos, hautes falaises ruiniformes d’une coloration ocre rouge. L’érosion a découpé en grands pains de sucre ces falaises dont la masse flamboyante écrase le petit village de Riglos.

 25 septembre

Le matin, nous visitons Huesca. Devenue en 714 une importante place forte arabe, elle fut conquise en 1096 par Pierre Ier d’Aragon et resta capitale jusqu’en 1118. Une petite histoire d’abord : Ramiro II, moine à St Pons de Thomières (chez nous !), succède à son frère. Lassé d’être contesté par les puissants du royaume, il convoque ses vassaux sous le prétexte de leur présenter une cloche qui puisse être entendue dans tout le territoire. Une fois les seigneurs réunis, le roi fait décapiter les plus indisciplinés… et hop !! La vieille ville est ceinte par une avenue en partie piétonne. Nous nous arrêtons d’abord à San Pedro el Viejo, un ancien monastère du 12e siècle. On peut y voir les tombeaux des rois Ramiro II et Alphonse Ier le Batailleur, seuls monarques de la dynastie aragonaise à ne pas être enterrés à San Juan de la Pena.

Puis, nous visitons la cathédrale et le musée. Pour entrer dans la cathédrale, il faut passer par le musée qui occupe les bâtiments de l’ancienne université. Il contient des collections archéologiques et une belle collection de tableaux de primitifs aragonais.
Dans la cathédrale, entre les 13e et 16e siècles, trois nefs de hauteurs différentes ont été édifiées sur un plan carré. Le retable du maître autel de 1533 en albâtre, compte parmi les chefs-d’œuvre de Damia Forment, un élève de Donatello. On y voit trois scènes du Calvaire en haut relief au milieu d’un décor de frises et de dais flamboyants.
En fin de matinée, nous visitons un atelier de céramique traditionnelle à Bandallies.

L’après-midi, nous allons dans le parc naturel de la Sierra y Canones de Guara, sur les contreforts des Pyrénées, pour visiter Alquézar. Au détour de la route apparaît le village accroché au rocher sur le rebord du canyon du rio Vero.
Au 9e siècle, les Arabes y avaient édifié un alcazar, Al-Qsar (qui a donné son nom au village) qui fut repris par le roi Sancho Ramirez vers 1607. C’est à cette époque que furent élevées les murailles et l’église. Dans la lumière ocrée du soleil de l’après-midi, la vieille ville déploie un dédale de ruelles tortueuses bordées de maisons aux façades blasonnées et aux portails de pierre. Certains en profitent pour faire quelques achats dans une boutique des plus pittoresques et de renommée internationale pour ses décors et ses produits d’antan, la Confianza.

26 septembre

Ce matin, nous quittons Huesca pour Saragosse.
Située au confluent de l’Ebre et des rios Gallego et Huerva, la cité devint en 25 av.JC une colonie romaine sous le nom de Caesaraugusta et est l’un des principaux ports de la péninsule. Elle passe ensuite aux mains des Wisigoths au 5e, puis des musulmans au 8e. Rebaptisée Sarakusta, la ville connaît une période faste au 11e sur le plan culturel et scientifique. En 1118, Saragosse est conquise par le roi Alphonse le Batailleur. Elle protège ses maçons musulmans habiles à travailler la brique. Le style mudéjar s’illustre dans les éléments qui subsistent au palais de l’Aljeferia, sur le chevet et le mur de la « Parroquieta » de la Seo et dans l’église San Pablo.

Nous entrons dans la ville par la porte du marché couvert où les initiales C et A de Caesar Augustus sont cachées dans la décoration des portes d’entrée du marché.
Nous passons devant l’église San Pablo de style gothique mudéjar pour arriver sur l’esplanade sur laquelle donnent les principaux monuments de la ville.
La basilique baroque de Nuestra Señora del Pilar est un des lieux de pèlerinage marial les plus réputés du catholicisme. En l’an 40, l’apôtre Jacques vient évangéliser la ville. Hélas, il ne convainc que 7 personnes. Désespéré, il va au bord de l’Ebre pour prier la Vierge Marie. Celle-ci lui apparaît alors sur un pilier et les conversions affluent. Pour abriter ce pilier, symbole de l’apparition de la Vierge, on édifia un sanctuaire. L’intérieur réunit des œuvres d’art de différentes époques. Les coupoles sont décorées de fresques, dont l’une fut réalisée par le jeune Goya. La chapelle de la Vierge est une église dans l’église. Elle abrite le pilier en jaspe recouvert d’argent et la petite statue gothique en bois de Marie. Le maître autel est surmonté d’un retable gothique sculpté par Damia Forment, entièrement consacré à la vie de Marie.

Puis, nous entrons dans la cathédrale, la Seo del Salvador. L’intérieur de cinq nefs d’égale hauteur présente une allure imposante. Les chapelles latérales ont été réservées par de riches familles de la ville pour s’y remémorer leurs morts. On dirait que ces familles ont rivalisé pour montrer leur richesse ; c’est en effet une débauche d’or, d’argent, de marbre, sauf pour deux chapelles : une qui est restée en l’état après l’incendie de la cathédrale et une autre qu’un riche bourgeois a fait décorer pour ses serviteurs ! Dans cette église, le musée des tapisseries possède une belle collection de tentures gothiques.
Nous sommes quelques-uns à être allés au musée Goya. Nous avons pu y admirer ses gravures provenant des séries « Les Caprices », « Les désastres de la Guerre », « La Tauromachie » et « Les Disparates ».

Après un repas de tapas, nous avons fait un tour en ville en nous arrêtant au parc del Agua Luis Buñuel.
Et nous avons terminé notre séjour à Saragosse avec la visite du palais musulman de l’Aljaferia, palais arabe, palais chrétien médiéval, palais des Rois Catholiques et enfin siège du Parlement de la communauté autonome d’Aragon. Derrière une façade massive, nous découvrons un intérieur d’une extrême délicatesse, évoquant les palais maures d’Andalousie : un beau patio entouré de portiques est décoré de fins entrelacs et de chapiteaux ciselés. Au 12e siècle, le palais subit de nombreux apports gothiques et mudéjars. Il présente des plafonds décorés des blasons des familles nobles et un dallage en céramique.

27 septembre

Ce matin, nous partons pour le monastère de Piedra à Nuevalos. Après la traversée de terres rouges arides (à part des éoliennes, il n’y a pas grand-chose à voir), nous traversons le village de Nuevalos et nous découvrons, caché dans les replis du plateau, un parc irrigué par le rio Piedra.

Au cœur de la forêt jaillissent cascades et cascadelles. La « Queue de Cheval », cascade de 53 mètres, crée la première surprise. Viennent ensuite le « Bain de Diane » et le « lac du Miroir », enserrés entre de hautes falaises ; là vivent truites, écrevisses et libellules. Puis, par un escalier aussi raide que glissant, nous descendons jusque dans la belle « Grotte de l’Iris », au milieu des embruns et du bruit fracassant de la chute d’eau. Nous terminons par la visite des ruines gothiques du monastère dont subsistent la cuisine, le réfectoire et le cloître.

Après avoir déjeuné d’une truite du lac, nous partons pour Calatayud. Cette ville fut fondée par les musulmans au 8e siècle. À la frontière de la Castille, elle fut longtemps un point de défense essentiel. Aujourd’hui, elle garde les traces de cette histoire, et notamment son héritage mudéjar. Deux tours sont particulièrement intéressantes : celle de l’église San Andrès et celle de la collégiale de Santa Maria, qui possède également un beau portail en albâtre. L’église de San Juan el Real abrite quant à elle des œuvres de Goya.

28 septembre

Pour notre dernier jour, nous passons par la Navarre.
Le désert des Bardenas Reales présente d’extraordinaires paysages de plaines, de ravins, de buttes et de steppes, comme dans un western. Nous découvrons la Bardena Blanca aux sols blanchâtres et nus et à l’aspect désertique dû à un climat caractérisé par des étés très chauds, des hivers très froids et de rares pluies.


Nous finissons notre périple à Olite. La ville gothique vit à l’ombre d’un château qui, à lui tout seul, a l’allure et les dimensions d’une cité médiévale.

Et j’en resterai là. Car, cette année, en juin, nous commencerons notre voyage en Navarre par… Olite.